Le monstre des Hawkline dans la sauce
Vers la fin du dîner, le monstre des Hawkline quitta les colliers et sauta sur la table. Il se condensa dans une louche qui se trouvait dans une grande saucière sur la table. L’ombre du monstre s’étala sur la sauce et fit semblant d’en faire partie.
Il n’était guère facile pour l’ombre de ressembler à de la sauce, mais elle y mettait tout son cœur, et s’en sortait assez bien.
Cameron s’amusait de voir le monstre sur la table. Il comprenait parfaitement les difficultés éprouvées par l’ombre pour ressembler à de la sauce.
— Quelle bonne sauce, dit Greer à Cameron.
— Ouais, dit Cameron, en jetant un coup d’œil à Greer.
— Vous en reprenez ? demanda Miss Hawkline.
— Elle est drôlement bonne, répondit Greer. Tu en veux, Cameron ?
L’ombre du monstre des Hawkline s’aplatissait de son mieux sur la surface de la sauce. Le monstre, quant à lui, n’était pas très à l’aise dans la louche qui brillait un peu trop.
— Je ne sais pas. Je n’ai vraiment plus faim. Mais… Cameron posa la main sur la louche. Il touchait le monstre des Hawkline. Cette louche, bien qu’elle fût posée dans une saucière de sauce brûlante, était glacée.
Cameron se demandait s’il arriverait à tuer ce monstre. Mais comment tuer une louche ? En attendant, il se servit de la louche en question pour remettre de la sauce sur ses pommes de terre.
Le monstre accomplit avec obligeance son rôle de louche. L’ombre réussit à se sortir de la louche en se tortillant lorsque Cameron prit la sauce, et elle retomba maladroitement dans la saucière.
L’ombre, presque en nage, n’en menait pas large.
Cameron remit la louche dans la saucière, et dérangea de nouveau l’ombre prise de panique.
— Et toi, Greer ? Veux-tu de cette bonne sauce ?
Les sœurs Hawkline étaient ravies du succès de leur sauce.
— Non, Cameron. Elle est délicieuse, mais je n’ai vraiment plus de place, dit Greer. Je crois que je vais rester à te regarder l’apprécier. J’aime bien voir un homme se régaler.
L’ombre se sentit comme une vague envie de vomir.